Vous envisagez d’acheter votre premier logement et le Bail Réel Solidaire (BRS) vous fait de l’œil ? Normal, quand on vous annonce 30 à 35% de réduction sur le prix d’achat, ça donne envie ! Mais attendez un peu avant de signer…
Comme toute belle promesse en immobilier, le BRS cache quelques épines derrière ses roses. Entre la redevance mensuelle à vie, les conditions d’éligibilité ultra-strictes et les contraintes de revente, vous pourriez avoir quelques surprises.
C’est vrai que ce dispositif peut être formidable pour certains ménages. Mais pour d’autres, il peut se transformer en véritable casse-tête administratif et financier.
Vous voulez connaître tous les inconvénients du BRS avant de vous lancer ? Parfait, on va faire le tour de la question ensemble, sans langue de bois !
Qu’est-ce que le Bail Réel Solidaire (BRS) ?
Le Bail Réel Solidaire est un dispositif créé par la loi ALUR de 2014 qui permet d’acheter un logement sans acquérir le terrain sur lequel il est construit. Concrètement, vous devenez propriétaire des murs, mais pas du foncier.
Le principe est simple : un organisme foncier solidaire (OFS) reste propriétaire du terrain et vous signe un bail d’une durée de 18 à 99 ans (généralement au moins 80 ans). En échange, vous payez une redevance mensuelle pour ‘louer’ le terrain.
Cette dissociation foncier-bâti permet de réduire significativement le prix d’achat du logement. Dans certaines zones tendues, cette réduction peut atteindre 50% du prix du marché, même si la moyenne se situe plutôt entre 30 et 35%.
Le dispositif vise à faciliter l’accession à la propriété pour les ménages aux revenus modestes et intermédiaires. Depuis janvier 2024, plus de 90% des ménages seraient éligibles au BRS, selon les nouvelles conditions de ressources.
Avantage financier immédiat : combien peut-on économiser ?
Avant de plonger dans les inconvénients, reconnaissons que le principal avantage du BRS reste spectaculaire : la baisse immédiate du prix d’achat.
Prenons un exemple concret. Un appartement de 70 m² qui coûterait normalement 280 000 € peut être proposé à 182 000 € en BRS. Soit une économie de 98 000 € sur le prix d’entrée ! De quoi vous permettre d’acheter dans des quartiers qui vous semblaient inaccessibles.
Cette réduction s’accompagne souvent d’autres avantages financiers :
- TVA réduite à 5,5% pour les logements neufs (contre 20% habituellement)
- Possibilité de cumuler avec le prêt à taux zéro (PTZ)
- Exonération possible de taxe foncière pendant quelques années
- Frais de notaire réduits puisque basés sur le prix minoré
Sur un logement neuf à 180 000 €, la TVA réduite vous fait économiser environ 26 100 €. Pas mal, non ?
Contraintes financières récurrentes : la redevance au foncier et ses impacts
Maintenant, parlons du revers de la médaille. Cette économie à l’achat se transforme en coût récurrent : la redevance versée à l’organisme foncier solidaire.
Cette redevance varie généralement entre 1 et 4 € par m² et par mois. En Île-de-France, comptez environ 2 € du m². Sur notre appartement de 70 m², cela représente 140 € par mois, soit 1 680 € par an.
Attention, cette redevance s’ajoute à votre crédit immobilier ! Si vous avez économisé 98 000 € à l’achat mais que vous payez 140 € de plus par mois pendant 25 ans, le calcul change. Au final, vous aurez versé 42 000 € de redevance sur la durée du prêt.
Pire encore : cette redevance est indexée sur l’indice de révision des loyers (IRL) ou l’indice du coût de la construction (ICC). Elle augmente donc chaque année. Dans 20 ans, vos 140 € mensuels pourraient facilement dépasser les 200 €.
Et cerise sur le gâteau : contrairement aux intérêts d’emprunt, la redevance n’est pas déductible de vos impôts si vous louez occasionnellement votre logement.
Le piège de la durée
Cette redevance, vous la payez pendant toute la durée du bail. Si vous restez 30 ans dans votre logement, vous aurez versé plus de 60 000 € de redevance (sans compter les revalorisations). L’économie initiale s’évapore progressivement.
Conditions d’éligibilité et limites d’usage
Le BRS n’est pas accessible à tout le monde, et même si vous êtes éligible, les contraintes d’usage peuvent vous poser problème.
Les plafonds de ressources
Malgré l’assouplissement de 2024, des plafonds de ressources s’appliquent. Ils varient selon la zone géographique et la composition du ménage. Un couple sans enfant en zone A (Paris, Côte d’Azur) ne peut pas dépasser environ 67 000 € de revenus annuels.
Ces plafonds concernent vos revenus au moment de l’achat, mais aussi lors d’une éventuelle revente. Si vos revenus augmentent significativement, vous pourriez être contraint de revendre à l’OFS.
L’obligation de résidence principale
Votre logement BRS doit obligatoirement être votre résidence principale. Impossible donc d’en faire un investissement locatif classique ou une résidence secondaire.
Vous pouvez le louer temporairement (mutation professionnelle, études supérieures), mais avec l’accord de l’OFS et dans des conditions très encadrées. La location saisonnière type Airbnb est généralement interdite.
Les autres restrictions
D’autres contraintes peuvent s’appliquer selon l’OFS :
- Interdiction de sous-louer tout ou partie du logement
- Obligation d’occuper le logement au moins 8 mois par an
- Contrôles périodiques de l’OFS pour vérifier le respect des conditions
- Déclaration obligatoire de tout changement de situation
Revente encadrée et plus-value : comment ça marche et quelles conséquences ?
La revente d’un logement BRS, c’est tout un parcours du combattant. Vous ne pouvez pas vendre à qui vous voulez, au prix que vous voulez, quand vous voulez.
Le prix de revente encadré
Le prix de revente est encadré par l’OFS selon une formule d’indexation précise. Généralement, votre prix d’achat initial est revalorisé selon l’IRL ou l’ICC, plus une éventuelle prise en compte des travaux réalisés.
Concrètement, si vous avez acheté 182 000 € et revendez 10 ans plus tard, votre prix pourrait être limité à 220 000 € alors que le marché libre atteindrait peut-être 350 000 €. Votre plus-value est donc plafonnée.
L’acheteur doit être éligible
Vous ne pouvez vendre qu’à un acquéreur répondant aux mêmes conditions d’éligibilité que vous (revenus, résidence principale). Cela réduit considérablement le bassin d’acheteurs potentiels.
Si aucun acquéreur éligible ne se présente dans un délai raisonnable, l’OFS peut exercer son droit de préemption et racheter votre logement au prix encadré. Vous n’avez pas vraiment le choix.
Les délais de vente rallongés
Cette double contrainte (prix encadré + acheteur éligible) rallonge mécaniquement les délais de vente. Comptez plusieurs mois supplémentaires par rapport à une vente classique. Problématique si vous devez déménager rapidement pour des raisons professionnelles.
| Aspect | Vente classique | Vente BRS |
|---|---|---|
| Prix de vente | Prix du marché | Prix encadré par l’OFS |
| Acheteurs potentiels | Tous | Ménages éligibles uniquement |
| Délai moyen | 3-4 mois | 6-8 mois |
| Plus-value | Libre | Plafonnée |
Durée du bail et scénarios de fin de contrat
Le bail réel solidaire n’est pas éternel. Sa durée varie de 18 à 99 ans, mais la plupart sont signés pour au moins 80 ans. Que se passe-t-il quand le bail arrive à échéance ?
Le renouvellement du bail
En théorie, le bail peut être renouvelé si vous remplissez toujours les conditions d’éligibilité. Mais l’OFS n’y est pas obligé. Il peut décider de récupérer le terrain pour un autre projet.
Si le renouvellement est refusé, l’OFS doit vous indemniser pour la valeur du bâti. Mais cette indemnisation se base sur la valeur vénale du bien, minorée des coûts de démolition éventuels. Pas forcément avantageux.
La transmission du bail
Vous pouvez transmettre votre bail BRS à vos héritiers, mais seulement s’ils répondent aux conditions d’éligibilité. Si vos enfants dépassent les plafonds de ressources, ils devront revendre dans un délai généralement fixé à 5 ans.
Cette contrainte peut compliquer votre stratégie patrimoniale. Impossible de constituer un patrimoine immobilier ‘familial’ si vos descendants ne peuvent pas conserver le bien.
Les risques de l’OFS
Votre relation avec l’OFS s’étale sur plusieurs décennies. Que se passe-t-il si l’organisme rencontre des difficultés financières ? Si sa politique change ? Si il est racheté par un autre acteur ?
Même si des garanties légales existent, cette dépendance à long terme représente un risque difficile à évaluer au moment de signer.
Travaux, modifications et autorisations : quelle liberté pour le propriétaire ?
Propriétaire du bâti, vous avez logiquement le droit d’effectuer des travaux dans votre logement. Mais attention, certaines interventions nécessitent l’accord préalable de l’OFS.
Les travaux soumis à autorisation
Généralement, vous devez obtenir l’accord de l’OFS pour :
- Les travaux modifiant la structure du bâtiment
- L’extension ou la surélévation
- La modification du nombre de pièces
- Les travaux affectant les parties communes (copropriété)
- L’installation d’équipements énergétiques (panneaux solaires, pompe à chaleur)
Cette obligation peut retarder vos projets et ajouter une couche administrative. L’OFS peut refuser certains travaux s’ils ne respectent pas ses critères environnementaux ou architecturaux.
La prise en compte des travaux dans la valeur
Bonne nouvelle : les travaux d’amélioration peuvent être pris en compte lors de la revente, mais selon une grille fixée par l’OFS. Tous vos investissements ne seront pas forcément valorisés au même niveau que sur le marché libre.
Une cuisine à 15 000 € pourrait ne vous être comptabilisée qu’à 8 000 € dans le calcul du prix de revente. De quoi refroidir vos ardeurs de rénovation.
Financement et marché : banques, PTZ, notoriété et liquidité du BRS
Obtenir un crédit pour un logement BRS peut s’avérer plus compliqué qu’un financement classique. Toutes les banques ne maîtrisent pas encore ce dispositif.
L’attitude des banques
Certaines banques restent prudentes face au BRS. Elles s’interrogent sur :
- La valeur de garantie d’un bien à la revente encadrée
- La liquidité du marché en cas de défaillance de l’emprunteur
- La complexité juridique du montage
- L’évaluation du risque sur une durée si longue
Résultat : vous pourriez essuyer quelques refus ou obtenir des conditions moins avantageuses (taux plus élevé, apport personnel plus important).
Les avantages financiers disponibles
Heureusement, le BRS permet de cumuler avec plusieurs dispositifs aidés :
- Prêt à taux zéro (PTZ) : souvent sur un montant plus élevé qu’en accession classique
- Prêt Action Logement (ex-1% patronal)
- Prêts bonifiés des collectivités locales
- TVA réduite à 5,5% sur le neuf
Ces aides compensent partiellement les difficultés de financement, mais réclament un dossier administratif bétonné.
Un marché encore restreint
Le marché du BRS reste relativement confidentiel. En 2024, il représente environ 26% de l’accession sociale au neuf (contre 7% fin 2021), mais cela reste marginal par rapport au marché immobilier global.
Cette faible notoriété peut compliquer :
- La recherche de biens disponibles
- L’accompagnement par les professionnels (agents immobiliers, notaires)
- La revente (bassin d’acquéreurs restreint)
Pour qui le BRS est-il adapté ?
Après ce tour d’horizon des inconvénients, une question s’impose : le BRS peut-il malgré tout vous convenir ?
Le profil idéal
Le BRS semble particulièrement adapté si vous :
- Cherchez une résidence principale stable pour au moins 15-20 ans
- Avez des revenus modestes ou intermédiaires mais réguliers
- Privilégiez la sécurité du logement à la spéculation immobilière
- Acceptez de payer une redevance récurrente
- N’envisagez pas de constituer un patrimoine immobilier important
Typiquement, un couple de trentenaires avec enfants, en CDI, souhaitant se stabiliser dans une région peut y trouver son compte.
Les profils à éviter
À l’inverse, le BRS convient mal si vous :
- Changez fréquemment de région pour votre travail
- Visez un investissement immobilier rentable
- Voulez transmettre un patrimoine conséquent à vos enfants
- Préférez la liberté totale sur votre bien
- Avez des revenus très fluctuants
Les professions libérales, entrepreneurs ou cadres très mobiles devraient probablement s’orienter vers l’accession classique.
Conseils pratiques avant de s’engager
Si malgré tous ces inconvénients, le BRS vous intéresse encore, voici quelques précautions à prendre avant de signer.
Vérifiez la solidité de l’OFS
Renseignez-vous sur l’organisme foncier solidaire : son historique, ses références, sa santé financière. Consultez ses derniers bilans comptables. Parlez avec d’autres acquéreurs ayant déjà traité avec lui.
Un OFS défaillant peut transformer votre achat en cauchemar administratif durant des décennies.
Analysez le coût global
Ne vous arrêtez pas à l’économie initiale. Calculez le coût total sur 20-25 ans en intégrant :
- La redevance mensuelle et ses revalorisations
- Les frais de dossier spécifiques au BRS
- Les contraintes de revente
- Le manque à gagner en plus-value
Utilisez les simulateurs disponibles sur les sites spécialisés pour affiner vos calculs.
Négociez les termes du bail
Certain éléments du bail peuvent être négociés :
- Le montant initial de la redevance
- Les modalités de révision
- Les conditions de renouvellement
- Les travaux dispensés d’autorisation
N’hésitez pas à faire appel à un notaire spécialisé pour vérifier tous les termes contractuels.
Préparez votre dossier de financement
Constituez un dossier solide pour rassurer les banques :
- Apport personnel conséquent (au moins 10%)
- Justificatifs de revenus stables
- Simulation détaillée du coût total
- Présentation claire du dispositif BRS
Rencontrez plusieurs banques et comparez leurs offres. Certaines sont plus à l’aise avec le BRS que d’autres.
Questions fréquentes sur les inconvénients du BRS
Est-ce bien d’acheter en BRS ?
Acheter en BRS peut être intéressant si vous cherchez une résidence principale stable et acceptez les contraintes. Le dispositif convient aux ménages privilégiant la sécurité du logement à la spéculation immobilière. Mais il faut bien mesurer l’impact de la redevance récurrente et des limitations de revente.
Quels sont les inconvénients d’un bail réel solidaire ?
Les principaux inconvénients sont : la redevance mensuelle à vie, les conditions d’éligibilité strictes, l’obligation de résidence principale, la revente encadrée avec plus-value plafonnée, la dépendance à l’OFS, et les contraintes administratives pour certains travaux. Le marché reste aussi moins liquide qu’en accession classique.
Qui paie la taxe foncière en BRS ?
C’est vous, l’acquéreur, qui payez la taxe foncière en BRS, même si vous n’êtes propriétaire que du bâti. La taxe porte sur l’ensemble de la propriété (terrain + construction). L’OFS propriétaire du foncier n’a pas cette charge fiscale.
Quels sont les frais de notaire pour un BRS ?
Les frais de notaire sont calculés sur le prix d’achat minoré (hors foncier), ce qui les réduit significativement. Sur un bien à 182 000 € en BRS au lieu de 280 000 € en classique, vous économisez environ 7 000 € de frais. Mais attention aux frais spécifiques liés à la complexité juridique du montage.
Peut-on perdre son logement BRS ?
Vous pouvez perdre votre logement BRS si vous ne respectez plus les conditions d’éligibilité (revenus trop élevés, non-occupation en résidence principale) ou si vous ne payez pas la redevance. L’OFS peut aussi ne pas renouveler le bail à son échéance, bien que ce soit rare en pratique.
Le BRS est-il transmissible aux enfants ?
Oui, le bail BRS est transmissible par héritage, mais vos héritiers doivent respecter les mêmes conditions d’éligibilité que vous. S’ils dépassent les plafonds de ressources ou n’occupent pas le logement en résidence principale, ils devront le revendre dans un délai fixé par l’OFS (généralement 5 ans).
Que se passe-t-il si l’OFS fait faillite ?
En cas de défaillance de l’OFS, des mécanismes de protection existent. Un autre organisme peut reprendre la gestion, ou les collectivités peuvent intervenir. Vos droits sur le bâti restent protégés, mais la situation peut créer des incertitudes temporaires sur la gestion de votre redevance et les modalités de revente.